Commentaire d'un texte de Descartes
sur l'origine de nos erreurs

Ensuite de quoi, venant à me regarder de plus près et à considérer quelles sont mes erreurs, lesquelles seules témoignent qu'il y a en moi de l'imperfection, je trouve qu'elles dépendent du concours de deux causes, à savoir: de la faculté de connaître qui est en moi, et de la faculté d'élire, ou bien de mon libre arbitre, c'est-à-dire de mon entendement, et ensemble de ma volonté. Car par l'entendement seul je n'assure ni ne nie aucune chose, mais je conçois seulement les idées des choses que je puis assurer ou nier. Or, en le considérant ainsi précisément, on peut dire qu'il ne se trouve jamais en lui aucune erreur, pourvu qu'on prenne le mot d'erreur en sa propre signification. …/…
D'où est-ce donc que naissent mes erreurs? c'est à savoir de cela seul que la volonté étant beaucoup plus ample et plus étendue que l'entendement, je ne la contiens pas dans les même limites, mais que je l'étends aussi aux choses que je n'entends pas; auxquelles étant de soi indifférente, elle s'égare fort aisément, et choisit le faux pour le vrai et le mal pour le bien; ce qui fait que je me trompe et que je pèche.

Descartes, Méditation 4

 

Dans le Discours de la Méthode, qui est pourtant un discours « pour bien conduire sa raison et trouver la vérité dans les sciences », Descartes ne parle étonnement de l'erreur que tout à fait en passant, sans même la nommer, à savoir lorsque, au cours de l'énoncé de la première règle de sa méthode, il se propose "d'éviter soigneusement la précipitation et la prévention".
Il faudra attendre la quatrième de ses Méditations de philosophie première pour que Descartes se penche sur l'erreur pour en faire la théorie. Descartes y recherche l'origine de nos erreurs et pense la trouver dans le fait, pour l'esprit, de ne pas maintenir ses jugements dans les limites de ce que la pensée lui permet de concevoir clairement et distinctement. S'appuyant sur l'analyse de ses propres erreurs, Descartes commence ainsi par en déceler l'origine dans un mauvais concours de la volonté et de l'entendement, ce qu'il justifie en donnant à observer ensuite qu'elle ne sauraient être le fait du seul entendement mais du non respect des limites inhérentes à ce denier par notre volonté, qui est capable de se prononcer au-delà de ce qu'il lui permet de savoir, au risque de se tromper.

 

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