La conscience
  

Plan

Introduction

- Entrée en scène de la conscience
 dans l'histoire de la philosophie: Descartes

- Définition

I .Nature, fonction et formes de la conscience

1. Caractéristiques:
a) La conscience est intentionnelle Cf. Husserl

b) La conscience est synthétique Cf.Kant

c) La conscience est sélective Cf.Bergson

2. Fonction

3. Formes

II. La conscience, vérité ou illusion ?

1. La conscience accréditée (Bergson)

2. La conscience discréditée (Spinoza, Freud)

Conclusion, transition

Conscience, inconscience, inconscient

 
 

Introduction

 

Entrée en scène de la conscience dans l'histoire de la philosophie

Le Discours de la méthode (1637) de René Descartes est, dans l'histoire des idées, le texte de référence de l'apparition au grand jour de la conscience sur la scène de la pensée philosophique (même si le mot de conscience n'y figure pas).

Cf. Texte-extrait du Discours, IV

Définition de la conscience

" La conscience est l'intuition qu'a l'esprit de ses états et de ses actes " (A. Lalande)

Remarque complémentaire:

La relation de soi à soi de la conscience est conjointement et indissociablement relation de la conscience au monde.

Cf. Kant: "La conscience de ma propre existence est en même temps une conscience immédiate d'autres choses hors de moi."
Cf. Sartre: "La conscience et le monde sont donnés d'un même coup: extérieur par essence à la conscience, le monde est, par essence, relatif à elle."

 

 

Première partie: Nature, fonction et formes de la conscience

 

A. Les caractéristiques de la conscience

a) Première caractéristique : la conscience est intentionnelle

Découverte de Husserl de l'intentionnalité de la conscience, càd de "cette nécessité pour la conscience d'exister comme conscience d'autre chose que soi " (Sartre)

N.B. Modalités de l'intentionnalité: cognitives, volitives, affectives.

b) Deuxième caractéristique : la conscience est activité de synthèse

Conditions requises pour qu'il y ait conscience: il faut qu'il y ait non seulement 1) un objet, mais aussi 2) un sujet et 3) qu'il y ait relation de l'un à l'autre: toute conscience est conscience d'UN sujet. Toute représentation mentale est en effet l'acte de SE représenter qqc, càd une synthèse (intuitive) d'impressions qui est l'oeuvre d'un sujet qui se les présente à lui-même comme représentatives d'un objet, càd de qqc qui forme un tout.

Elle est un acte de la spontanéité: "on ne saurait la considérer comme appartenant à la sensibilité. ... elle est cette conscience de soi qui, en produisant la représentation je pense, doit pouvoir accompagner toutes les autres.... et qui, une et identique en toute conscience, ne peut être accompagnée d'aucune autre." Cf Kant

c) Troisième caractéristique : la conscience est sélective

La conscience est tout autre chose qu'une sorte de lumière qui éclairerait passivement une réalité déjà constituée, se contentant d'en révéler la présence.

De tout ce qui se passe à chaque instant, nous ne percevons qu'une infime partie. De tout ce que nous avons vécu, nous ne nous remémorons de même que des fragments...

Explication: la conscience, non seulement relie ce qui s'offre à elle, mais encore, ce faisant, opère des choix. Cf. Bergson

B. Fonction de la conscience

La conscience est au service de la vie.
Elle remplit une fonction adaptative. Cf.
Nietzsche

C. Formes de la conscience

Distinguer deux intentionnalités fondamentales de la conscience.
Cf. Rabelais : "science sans conscience n'est que ruine de l'âme"
Cf. Canguilhem "il n'y a rien dans la science qui n'ait d'abord apparu dans la conscience".

Dans un cas, conscience axiologique, qui porte des jugements de valeur, évaluative.

N.B. Sur la conscience morale proprement dite, voir texte de Kant

Dans l'autre cas, conscience psychologique, qui porte des jugements de réalité, constatative.

 

Deuxième partie: La conscience, vérité ou illusion

 

Problème : nous nous fions aux "données immédiates de la conscience", qui apparaissent comme l'expression fidèle de ce qui nous arrive. Avons-nous raison ?

 

A. La conscience accréditée

a) Les raisons d'une confiance
Tout ce que nous savons, nous le tenons des données immédiates de notre conscience, constitutives de notre vie mentale.

==> Méconnaître cette vie, ce serait s'interdire tout accès à la réalité tant intérieure qu'extérieure. C'est au vécu de la conscience qu'il faut constamment revenir pour se faire une idée de ce qui est. Les mots, en effet, par lesquels nous formulons notre savoir, sont en nombre limité, aussi nous obligent-ils à schématiser le vécu de la conscience, toujours original, à nul autre semblable!

Ex. du temps. Le vrai temps n'est pas le temps mesuré, artificiel par nature, c'est le temps tel que l'éprouve la conscience, celui de la durée.

b) Et pourtant...

La certitude sensible, celle des données immédiates de la conscience, est celle d'une conscience confuse, "à l'état de fermentation". (Hegel) Ce n'est que par le langage que les données immédiates de la conscience sont susceptibles d'être élevées à leur vérité, en se détachant du moi pour mieux s'offrir à lui.

Cf."Nous n'avons conscience de nos pensées, nous n'avons de pensées déterminées et réelles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les différencions de notre intériorité."(Hegel)

 

B. La conscience discréditée

 

Défiance ! Non seulement, à l'état brut, la conscience est confuse, mais même élaborée elle est lacunaire.

 

a) Point de vue de Spinoza
Cf. Lettre à Schuller

Loin d'être une sorte d'oracle intérieur, la conscience engendre quantité d'illusions, qui procèdent de ce qu'elle est partielle...

Ex

- Illusion d'être libre, faute de savoir ce qui nous pousse à agir.

- Illusion d'être au centre de l'univers, voyant tout à partir de soi.

- Illusion que tout dans la nature a été conçu en vue d'une fin, à l'image de notre activité consciente.

 

b) Découverte de Freud
Le privilège accordé à la conscience (dans la connaissance de soi) est démesuré et injustifié:« pour bien comprendre la vie psychique, il est indispensable de cesser de surestimer la conscience. » (Freud)

 

Conclusion

Si nous tenons tout ce que nous savons de la conscience, reste que celle-ci, en son état brut, non travaillé, et pour cela critiqué, est lacunaire et précaire.

Aussi est-il contestable de vouloir tout faire reposer sur son seul témoignage (comme le fait Sartre après Alain, pour des raisons morales...).

Il semble nécessaire d'explorer les zones d'ombres sur lesquelles la conscience se détache.

Pour désigner les zones d'ombre évoquées, on ne parle plus guère aujourd'hui que d'inconscient, sous l'effet du succès de la psychanalyse. Mais si l'on demande à quelqu'un de dire spontanément quel est pour lui le contraire de conscience, il parlera d'inconscience et non d'inconscient. Or chacun de ces termes recouvre une forme de non-conscience propre. Aucun des deux ne saurait se substituer à l'autre.

 

L'inconscience

est l'ignorance des situations et de leur sens. Elle porte sur notre relation au monde extérieur : elle est "situationnelle".

Corriger l'inconscience, travail des sages tels que Confucius, Héraclite, Socrate, Pascal, La Bruyère, Chamfort, Proudhon, Tolstoï, Sartre.

L'inconscient

est ignorance des motivations profondes qui nous font agir. L'inconscient est aveuglement de l'homme sur son propre coeur.

Explorer l'inconscient, c'est explorer les viscères psychologiques !

Les moralistes qui se sont donnés pour tâche de combattre cet aveuglement étaient des gens tels que Bouddha ( du Bouddhisme primitif), Saint Augustin, La Rochefoucauld, Rousseau, Nietzsche, Dostoïevski.

Freud s'est illustré par l'effort déployé pour atteindre scientifiquement le même résultat...


© M. Pérignon